L'histoire de Von
Depuis 2010 Laos Solidarity (enregistrée en France sous le nom de Eau Laos SOLIDARITÉ—ELS) aide les enfants du Laos à améliorer leur bien-être.
Nous avons commencé par construire des toilettes et des laves mains, créé des clubs d’hygiène pour maintenir les pratiques d’hygiène de base dans le nord du Laos et dans les communautés. Les professeures nous ont demandé de nous attaquer à l’absence de connaissance et de compréhension de la puberté et de la santé menstruelle;nous avons donc commencé le Laos Girls Teen Project en partenariat avec la bibliothèque de Luang Prabang. Pourquoi ? Pour autonomiser les filles et les femmes afin qu’elles s’approprient leur propre bien-être.
Comme nous le dit notre présidente Sally...
“Il y a six ans j’enseignais dans une classe rurale près des chutes de Luang Si lorsque une fille de 15 ans, Vone m’a dit qu’elle pensait avoir un cancer.
Pendant 2 ans elle vivait dans l’angoisse de mourir. Elle avait également très peur qu’on découvre son secret honteux. Toutes les quatre semaines elle partait avec sa binette au coucher du soleil avec l’évidence cachée dans son petit sac à mains coloré. Après avoir creusé un trou sous un arbre, elle enlevait de son sac des papiers tachés de sang, les enterrait dans le trou, les recouvrait rapidement avec sa binette, tassant la terre et cachant le tout avec des feuilles mortes. Elle retournait ensuite en catimini dans sa hutte en bambou où elle habitait en espérant que personne ne s’en soit aperçu pendant qu’elle était à l’école. À cette époque là plupart des filles se lavaient à la rivière et personne ne lui demandait où elle allait en cachette dans la forêt avec son petit sac et sa binette.
Après le cours ce jour là, Vone est venue devant la classe poussiéreuse où je me tenais avec notre coordinatrice laotienne Chantha. Vone était nerveuse et grattait le sol avec ses tongs comme si cela lui donnerait le courage de parler à une étrangère. Elle me regarda avec des larmes dans les yeux. Quand elle eu fini de parler et nous aussi, elle eu ces mots “maintenant je sais que je suis normale et je n’ai plus peur “.
Quel était le terrible secret de Vone?
C’etait ses règles
Vous trouvez peut-être difficile de croire que personne dans la famille de Vone, à l’école ou parmi ses paires pouvait lui dire que les règles faisaient partie de la croissance. Mais en 2012, dans le Nord Laos il n’y avait aucune information pour les filles comme Vone. Il n’y avait pas de livre sur la puberté et les règles. C’etait un secret !
Pour les filles de 14 ans comme Vone, timide, avec une mère illettrée il n’y avait pas d’information disponible, même à l’école. Seulement en 4ème année à l’âge de 17 ans elle aurait un cours de biologie sur la santé reproductive. Mais dès l’âge de 15 ans certaines seraient déjà mères.
Les mères en campagne n’avaient aucune idée d’où venaient les règles et comme dans de nombreuses communautés au Laos elles ne parlaient pas de leurs corps. Ainsi elles ne prévenaient pas leurs filles que cela allait arriver.
Lors d’une étude préliminaire en collaboration avec l’équipe du programme de sensibilisation de la bibliothèque de Luang Prabang et des élèves en campagne nous avons découvert que seulement 3% savaient qu’elles allaient avoir leurs règles. 3%! Est-ce alors une surprise que 1 fille sur 10 au Laos soit mère dès 15 ans ?
Nous avons de plus découvert un niveau choquant de pratiques d’hygiène. Pour s’attaquer à ces deux problèmes nous avons écrit et publié, ce qui n’est pas évident au Laos où l’accord du gouvernement est nécessaire, mais aujourd’hui nous avons touché plus de 10000 filles dans les campagnes avec ces informations vitales sur leur croissance et sur comment elles peuvent prendre soin d’elles mêmes et continuer leurs études.
Plus tard dans la journée nous avons croisé un groupe de filles qui rentraient chez elles, toutes lisant le livre “Je suis une adolescente “. Pour la plupart d’entre elles c’était leur premier livre. Ce livre allait être partagé avec mères, sœurs, cousines et amies. Souvent ces filles allaient devenir une référence pour tout ce qui concerne les règles.
Ces filles ont accepté de monter dans notre camion car leur maison était à plus d’une heure et demi de marché. Elles nous ont aidé à pousser le camion quand il s’est bloqué au milieu de la rivière et ont couru chercher des pierres pour les mettre derrière les roues pour empêcher de glisser dans le fossé. Elles nous ont parlé. Personne n’était jamais venu dans leur école. Aucune d’entre elles ne savait qu’elle allait avoir ses règles. Elles n’ont les été choquées par cette information. “Savoir, disaient elles, nous donne la maîtrise de notre corps”.
Depuis ce jour nous avons distribué 15000 livres “Je suis une adolescente”et fourni 19000 kits avec serviettes hygiéniques, culotte, savon et sac à linge aux élèves et aux femmes dans les villages reculés. Si nous pouvons aider les filles comme Vone à se sentir normales, gérer leurs règles à l’école et gagner en confiance en tant que femme nous aurons fait ce que nous nous sommes fixés. La connaissance en vérité autonomise.
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